On suppose une fermentation alcoolique à partir de levures de type Saccharomyces cerevisiae ou genre voisin sur un substrat riche en saccharose et/ou glucose et/ou fructose (par exemple à partir de canne à sucre, ou d'amidon hydrolysé...).
L'éthanol est un métabolite primaire de type produit terminal du métabolisme énergétique.
Le schéma métabolique de la fermentation d'une molécule de saccharose ou de glucose ou de fructose est :
EMP : voie Embden-Meyeroff-Parnas (glycolyse) |
La réaction stoechiométrique de conversion du glucose ou du fructose en éthanol est :
C6H12O6 ------> 2 CO2 + 2 H3C-CH2OH
180 g/mol ------> 2* 44 g/mol + 2* 46 g/mol
Le rendement stoechiométrique limite est donc Yeth/gluc = 2*46/180 = 0,51 g éthanol par g de glucose (ou fructose).
La réaction stoechiométrique de conversion du saccharose en éthanol est :
C6H12O5-C6H11O5 ------> 4 CO2 + 4 H3C-CH2OH
342 g/mol ------> 4* 44 g/mol + 4* 46 g/mol
Le rendement stoechiométrique limite est donc Yeth/gluc = 4*46/342 = 0,54 g éthanol par g de saccharose.
Il faut bien comprendre que le rendement stoechiométrique est un rendement limite virtuel : ne pourrait être atteint que si la totalité le sucre consommé était dirigé exclusivement vers la voie fermentaire conduite à son aboutissement en éthanol !
Expérimentalement, sur un milieu synthétique minimal glucosé (YNB + glucose 15g/L) agité aéré, avec Sacch. cerevisiae, en phase exponentielle de croissance, le rendement pratique obtenu est de 0,34g d'éthanol par g de glucose. Sachant que, en aérobiose, quand le glucose est à plus de 2g/L, par effet Crabtree, le métabolisme est essentiellement fermentaire (à 80-90%). Et sachant que le glucose est source de C et d'énergie, la valeur pratique de 0,34 g/g n'est pas surprenante.
En travaillant dans des conditions où les levures ne se multiplient quasiment pas, en milieu peu aéré, on atteint un rendement de presque 0,5 g d'éthanol par g de glucose.
On se rapproche ainsi du rendement stoechiométrique. En effet, dans des conditions sans croissance,
il n'y a plus qu'une très faible consommation de glucose comme source de C (juste pour un peu de turn-over..) ; ainsi, quasiment tout le sucre consommé est utilisé comme source d'énergie pour le maintien cellulaire. Et donc presque tout le glucose
utilisé est fermenté.
On se rapproche ainsi très près du rendement stoechiométrique.
Pour obtenir des conditions où les levures fermentent et ne se multiplient quasiment pas, il faut travailler en milieu très très peu aéré, assez chargé en glucose, avec une charge en biomasse très importante et des concentrations élevées en éthanol à un niveau où il
devient inhibiteur de la croissance (vers 9% v/v).
Plusieurs programmes industriels sont à l'origine de la production d'éthanol carburant par fermentation à partir des sucres d'une biomasse agricole ou forestière:
Source de glucides = mélasse de canne à sucre (sucre principal = saccharose). Fermentation éthanolique par Saccharomyces cer. Gros programme industriel au Brésil. Ecologiquement acceptable ? On peut en douter.
Source de glucides = amidon de maïs hydrolysé (sucres principaux issus de l'hydrolyse de l'amidon = glucose + maltose). Fermentation éthanolique par Saccharomyces cer. Gros programme industriel aux USA. Ecologiquement acceptable ? On peut vraiment en douter.
Source de glucides = betteraves sucrières; (sucres principal = saccharose). Fermentation éthanolique par Saccharomyces cer. Gros programme industriel en Europe. Ecologiquement acceptable ? On peut vraiment en douter.
Source de glucides = mélasse de topinambour. Le topinambour (Helianthus tuberosus) est une plante tubérifère de la famille des Composées. Les pratiques culturales sont simples et la plante peut se contenter de terrains peu favorables aux cultures traditionnelles. Les tubercules contiennent 8 à 10 % de glucides (pour moitié des inulines ainsi que du glucose, du fructose et du saccharose). Les inulines sont des polymères de ß-fructose, avec liaisons de type ß 1-2.La levure Kluyveromyces marxianus est capable de produire des enzymes inulinases qui hydrolysent l'inuline en fructose. Le fructose est alors fermentescible en éthanol. Sinon on peut réaliser une étape d'hydrolyse enzymatique des inulines puis une fermentation par Saccharomyces cer. En développement industriel en Suisse, au Canada, au Japon, en France. Ecologiquement acceptable ?
La biomasse végétale (lignocellulosique) est théoriquement une
source potentielle très intéressante d'oses qui pose moins de problèmes "écologiques" que les sources agricoles
précédemment citées. L'hydrolyse de la cellulose est une source de glucose et l'hydrolyse des hémicelluloses une source de sucres en C5 (xylose, arabinose). Et finalement, la fermentation
éthanolique sur biomasse végétale exige de
trouver des solutions technologiques à 2 grands
problèmes :
- l'accessibilité à l'hydrolyse enzymatique des celluloses et
des hémicelluloses (le tout dans l'environnement
lignocellulosique végétal). Il faut obtenir une
hydrolyse poussée avec une cinétique rapide et un
coût faible. Cette question reste en
développement.
- Il faut utiliser des micro-organismes capable de fermentation
alcoolique sur des oses en C5 et ça ne court pas les rues : levures génétiquement
modifiées ou utilisation de bactéries type
zymomonas. Cette question reste en
développement.
On optimise le rendement de production d’éthanol (l’alcool) grâce à un procédé qui minimise l’utilisation des glucides comme source de carbone (l'idéal est que tout passe en fermentation éthanolique à des fins énergétiques compte tenu de l'objectif de production d'éthanol). En recyclant les levures en sortie de bioréacteur on obtient un double bénéfice : la quantité de levures dans le bioréacteur est maximale et la multiplication des levures est minimisée (il n'y a donc plus beaucoup de consommation de glucose comme source constitutive de C pour la croissance, le glucose part quasi exclusivement comme source d'énergie pour la maintenance cellulaire avec production du déchet métabolique alcool). |
Pour finir ce paragraphe "éthanol carburant" il convient de formuler un certain nombre de remarques.
Le "coût" d'un éthanol (bio)carburant n'est pas facile à déterminer : Combien d'équivalent pétrole produit pour
combien de pétrole consommé pour les phases agricoles/transport/fermentation-distillation ? Questions liées
à l'éventuelle consommation en eau d'irrigation, à l'utilisation éventuelle de produits phytosanitaires et d'engrais, au détournement vers
des objectifs énergétiues de cultures potentiellement utilisables pour l'alimentation ...